Lutte contre l'oubli
Cérémonies d'hommage
2003


Discours prononcé par Monsieur Nicolas SARKOZY Ministre de l'Intérieur,
de la Sécurité Intérieure et des Libertés locales,
lors de l'hommage organisé par S.O.S. ATTENTATS, à l'Hôtel National des Invalides.
En hommage aux victimes du terrorisme.
Cérémonie sous la présidence et en présence
du Monsieur Nicolas SARKOZY.

Madame la Présidente,

Mesdames et Messieurs,

Les mots semblent aujourd'hui faibles face à vos regards, face à la douleur du souvenir qu'ils portent. Ce monument si sobre, si beau, est lourd de signification. Il est l'expression de votre souffrance. Il est surtout l'illustration de votre volonté que jamais cette souffrance ne tombe dans l'oubli, dans la banalisation.

Je veux rendre un hommage tout particulier à Madame Françoise RUDETZKI pour l'action qu'elle accomplit avec tant de courage et de dignité. Mesdames et Messieurs, c'est votre volonté qui a permis de sortir les victimes du silence et de l'anonymat.

C'est bien la barbarie qui vous a blessée dans votre chair ou qui a emporté cet être cher sans lequel votre vie est aujourd'hui moins heureuse. Je n'ai pas vécu personnellement votre douleur. Mais sachez que je veux être auprès de vous, pour vous soutenir et vous accompagner. Votre combat contre le terrorisme et contre l'oubli des victimes est aussi le mien.

Notre première priorité a été de vous redonner la place et la dignité qui vous revient. Vous méritez plus de considération que vos bourreaux. Trop de victimes ont souffert du manque d'écoute et de respect de l'Etat. Trop de victimes ont été accablées par une double douleur : celle du terrorisme et celle du manque de considération.

Je souhaite que les victimes de demain n'aient plus le sentiment de faire peur, d'être "jetées de partout", d'être "oubliées" ou traitées avec mépris. L'Etat a été défaillant dans sa mission première qui est de protéger ses concitoyens. Et dans une singulière inversion des valeurs, il faudrait qu'en plus ces derniers s'excusent de se plaindre d'un drame inacceptable !

J'ai demandé aux policiers et aux gendarmes d'avoir constamment le regard tourné vers vous. Effectuer des procédures ne suffit pas. Il faut accueillir, écouter et soutenir. Ces femmes et ces hommes courageux, qui consacrent leur quotidien à votre protection en prenant parfois des risques pour leur propre sécurité, ont à cœur d'être à vos côtés, je peux vous l'assurer.

Au-delà, j'ai voulu engager un véritable partenariat avec l'ensemble des associations de victimes. Il faut écouter vos demandes, elles sont légitimes. Il faut tenter d'y répondre, c'est notre rôle. Si l'Etat ne s'occupe pas des victimes, qui le fera ?

Notre deuxième priorité est d'agir pour que personne ne connaisse votre souffrance. Le pire échec serait de reconnaître qu'une catastrophe aurait pu être évitée.

Les services spécialisés ont été renforcés. Des réseaux ont été démantelés. 71 terroristes ont été interpellés depuis un an. La lutte contre ce fléau est la priorité que j'ai fixée à tous les services de police et je peux vous assurer que c'est l'ensemble du Gouvernement qui est mobilisé.

Nous avons renforcé la loi pour que les services aient les moyens d'agir. Certains critiques se sont émus des atteintes aux droits de l'homme. J'affirme que nous n'avons porté atteinte à aucun des droits de l'homme. Mais, en même temps, nous considérons que ce n'est pas un droit de l'homme que de tuer des femmes, des enfants, des innocents.

Avec l'Espagne, l'Italie, l'Allemagne et le Royaume-Uni, la coopération en matière de lutte contre le terrorisme s'est renforcée. Les résultats sont là. En cette matière, c'est l'absence de coopération internationale qui rend vulnérable. C'est ce que j'ai expliqué à mes homologues algériens, marocains et tunisiens que je suis allé voir, après l'attentat de Casablanca. La création d'un espace de sécurité n'est pas envisageable sans travail en commun et échange d'informations. C'est dans cet esprit que les services français étaient présents sur les théâtres des attentats les plus dramatiques de ces derniers mois : Karachi en mai 2002, Bali en octobre, Riyad et Casablanca en mai 2003, et encore à Djakarta en août dernier.

Notre troisième priorité est de ne jamais laisser un acte impuni.

Pas un terroriste ne trouvera la quiétude en France. Aucune raison d'Etat ne peut être supérieure à la dignité de la République.

Il y va de la crédibilité de notre lutte et surtout des valeurs qui fondent notre République. Le temps des colloques pour expliquer les motivations d'actes de barbarie est révolu. Le terrorisme n'a aucune légitimité. Le droit des peuples ne se défend pas par la haine aveugle et destructrice. Celui qui tue des innocents pour se faire entendre ne mérite qu'une seule écoute, celle des juges.

Et aujourd'hui, je peux vous assurer que l'ensemble de nos partenaires européens et américains partagent ce principe.

La procédure judiciaire n'est pas terminée. Mais je puis vous assurer que mon homologue britannique m'a confirmé son soutien et sa détermination dans cette affaire. Rachid RAMDA sera jugé en France.

Mesdames et Messieurs, je tenais particulièrement à être présent auprès de vous aujourd'hui car le terrorisme bafoue les valeurs les plus fondamentales de notre République. Nous ne devons jamais fermer les yeux, jamais laisser l'oubli éteindre votre témoignage. C'est une obligation pour l'Etat et pour la Nation de partager vos combats et de vous accompagner.